
« Défiler avec les fauteuils roulants vides, c'est le summum de la souffrance. Cela symbolise l'absence de l'être aimé, mais on fait cela pour se faire remarquer. » En ce mardi matin pluvieux, Rosalba Chelkowski, de Pitgam, marche en compagnie de cinq autres veuves, elles aussi en train de pousser un fauteuil. Elles ouvrent la dix-huitième des manifestations silencieuses qui, depuis décembre 2004, tournent autour du palais de justice pour exiger que soient jugés les responsables de la mort de leurs maris.
Parmi ces dames en noir, figure Ginette Handtschoewercker, une Leffrinckouckoise, fidèle de l'Association régionale de défense des victimes de l'amiante (ARDEVA) depuis sa fondation en 1996. La lettre qu'elle envoie à Nicolas Sarkozy via la sous-préfecture résume « le film d'horreur que l'amiante, cette invisible tueuse, m'a fait vivre à mes dépens ». Elle y parle de son mari, Lucien, pontonnier au laminoir à l'usine des Dunes. « I l y est entré à 14 ans et il y a fait toute sa carrière, jusqu'à sa dispense d'activité » en raison de la dégradation de son état de santé.
Ce n'est que le 6 mai 2003, « neuf ans jour pour jour après son décès », à 58 ans, que le tribunal des affaires de la sécurité sociale de Lille condamnait son employeur pour « faute inexcusable » : sa mort était consécutive à l'inhalation de poussières d'amiante.
« Ce n'est que deux ans après sa mort que j'ai appris le mot "amiante". C' est une pneumologue de l'hôpital qui me l'a dit. Lui-même est mort sans savoir de quoi », se souvient Ginette Handtschoewercker. Elle raconte qu'elle le conduisait en voiture à l'hôpital pour lui faire respirer de l'oxygène. Même si elle ne veut « plus se replonger dans le dossier », elle lance : « Les étapes de la maladie restent dans ma mémoire. » Aujourd'hui comme hier, un sentiment de « colère » habite cette femme réservée. « Colère » de voir les menaces qui pèsent sur le maintien des juges d'instruction. « Colère » de constater que dans notre pays, aucun procès correctionnel spéficiquement lié à l'amiante ne s'est encore tenu : « On fait un procès en Italie (ndlr : à Turin contre Eternit ), et pourquoi pas en France ? »
Les prochains rendez-vous
Les prochains rendez-vous
Le mercredi 25 novembre, à 14 h, l'ARDEVA organise un rassemblement à la cour d'appel de Douai. L'association compte sur une cinquantaine de manifestants (un bus) pour protester contre un revirement dans les décisions jusqu'alors favorables aux victimes. À la suite d'un changement de magistrat, elles ne verraient plus, en appel, augmenter le montant des sommes que leur accordait le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA).
Le jeudi 10 décembre, des adhérents se rendront à Turin pour l'ouverture du procès contre Eternit.
Le dimanche 13 décembre, à 11 h, sera organisée une cérémonie à la stèle élevée à la mémoire de toutes les victimes de l'amiante, près du pont de la bataille du Texel.
Le mardi 15 décembre, à 10 h, aura lieu la dernière marche de l'année autour du palais de justice. La décision de les reconduire ou non en 2010 n'est pas encore prise. Elle dépendra de la réponse du gouvernement à la demande de l'association nationale ANDEVA de voir renforcer les moyens d'enquête fournis aux juges d'instruction. •
Source : http://www.lavoixdunord.fr/
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